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Théorie de la Dominance: Science ou fiction?

  • Photo du rédacteur: Julie
    Julie
  • 12 déc. 2023
  • 6 min de lecture

Dernière mise à jour : 4 oct.

On entend encore souvent parler de « dominance » pour expliquer ou justifier certaines pratiques en éducation canine. L’idée paraît séduisante : puisque nos chiens descendent des loups, il faudrait les « éduquer » comme on imagine qu’un loup alpha impose son autorité à la meute. Mais cette théorie, encore répandue auprès de certaines personnes et même de professionnels, repose en réalité sur une mauvaise interprétation scientifique.


Le problème ? Elle ne se contente pas d’être une idée dépassée. Elle influence directement la façon dont nous interagissons avec nos chiens, en mettant en danger leur bien-être, la qualité de notre relation avec eux… et parfois même notre sécurité.


Image créée à l'aide de DALL·E d'OpenAI
Image créée à l'aide de DALL·E d'OpenAI

Exploration de la théorie de la dominance : fondements et limites

La théorie de la dominance appliquée aux chiens domestiques trouve son origine dans des études menées… non pas sur les chiens, mais sur des loups en captivité. Cette étude réalisé en 1947, observaient des groupes de loups non apparentés, forcés de cohabiter dans des espaces restreints. Dans ces conditions artificielles, les loups développaient des structures hiérarchiques rigides et des comportements agressifs, mettant en avant la figure d’un prétendu « loup alpha ».


À partir de là, l’idée a été transposée aux chiens : on a suggéré que les relations humain-chien devaient suivre la même logique. C’est ainsi que sont nées des recommandations encore très répandues, comme imposer une hiérarchie stricte, réduire le « statut » du chien, ou recourir à des pratiques punitives telles que le renversement sur le dos ou la saisie du museau, censées « rappeler au chien qui commande ».


Le problème ? Cette vision est basée sur une mauvaise compréhension du comportement des loups, et elle ignore totalement l’évolution spécifique du chien domestique.


En réalité, les meutes de loups sauvages sont très différentes : elles sont constituées de unités familiales, guidées par un couple reproducteur. Les interactions agressives y sont rares ; la coopération et la cohésion sont la norme. Les chercheurs ont depuis longtemps réfuté l’idée d’un « alpha » qui dominerait les autres par la force.


De plus, appliquer directement ces observations aux chiens domestiques est une erreur. La domestication a profondément transformé leur comportement et leur physiologie : les chiens ont été sélectionnés pour leur sociabilité et leur coopération avec les humains et forme des groupes fluides plutôt que des meutes stables et quittant le groupe en cas de conflit répété. Même si certaines pratiques d’élevage récentes (sélections esthétiques extrêmes ou lignées de combat) ont pu brouiller ce processus, le chien n’est pas un loup miniature qui chercherait en permanence à prendre le pouvoir sur sa famille humaine.


Enfin, le mot « dominance » est souvent utilisé à tort. En science, la dominance ne désigne pas un trait de caractère permanent, mais une interaction ponctuelle, dans un contexte de conflit autour d’une ressource limitée. Un individu peut céder pour éviter une escalade, mais cela ne fait pas de lui un « dominé » au quotidien. Parler d’un chien « dominant » par nature n’a donc pas de sens.

En clair : la théorie de la dominance repose sur un mythe, qui non seulement simplifie à l’extrême des comportements complexes, mais qui en plus ouvre la porte à des méthodes d’éducation basées sur la peur, la force ou la douleur, au détriment du bien-être et de la relation humain-chien.


Les répercussions de la théorie de la dominance sur nos chiens… et sur nous

La théorie de la dominance a profondément marqué notre culture et se retrouve encore aujourd’hui dans de nombreux conseils en éducation canine. Vous avez sûrement déjà entendu qu’il faudrait :

  • manger avant son chien,

  • passer devant lui dans les portes ou couloirs,

  • lui interdire l’accès au canapé ou au lit,

  • ignorer ses sollicitations et ne jamais répondre à l’initiative.


Ces recommandations sont souvent présentées comme des règles incontournables pour « éviter qu’il ne prenne le dessus ». En réalité, elles reposent sur une pseudo-hiérarchie où l’humain doit constamment prouver sa « supériorité » au chien, parfois en ayant recours à la force, à la peur ou à des interdits arbitraires.


Le problème, c’est que cette vision alimente des étiquettes trop simplistes comme « chien dominant ». Ce terme est encore utilisé pour expliquer des comportements très différents :

  • Un chien qui grogne sur les autres est souvent un chien inquiet, marqué par des expériences négatives, qui cherche simplement à garder ses distances.

  • Un chien qui tire en laisse peut tout simplement manquer d’exercice physique et mental au quotidien.

  • Un chien qui grogne lorsqu’on le descend du canapé peut réagir à une douleur – une arthrose ou un inconfort non diagnostiqué, par exemple.


En réduisant ces situations complexes à une histoire de « dominance », on passe à côté des causes réelles des comportements. Les conseils donnés se traduisent alors par des règles arbitraires ou des punitions, qui ne font qu’ajouter de la confusion, de l’anxiété et parfois de la peur. Résultat : le mal-être s’aggrave et les comportements problématiques aussi.

Construire une relation sur cette idée de « dominance », c’est en réalité bâtir sur un malentendu. On nie la vraie nature sociale du chien et on oublie ses besoins fondamentaux. Pire encore : l’utilisation de la contrainte ou de la coercition fragilise la confiance, augmente les risques d’agressivité et peut même mettre en danger la sécurité du foyer.


En clair, la théorie de la dominance ne permet ni d’éduquer efficacement, ni de répondre aux besoins des chiens. Elle crée surtout un climat de malentendus, où la peur et la méfiance remplacent la complicité et la coopération.


Redéfinir la relation entre humains et chiens

Plutôt que de s’appuyer sur la vieille théorie de la dominance, plusieurs organisations de référence encouragent aujourd’hui une approche différente et plus respectueuse. Parmi elles :

  • American Veterinary Society of Animal Behavior (AVSAB) – Société Américaine des Comportementalistes Vétérinaires (2008)

  • International Association of Animal Behavior Consultants (IAABC) – Association Internationale des Consultants en Comportement Animal (2019)

  • Association of Professional Dog Trainers (APDT) – Association des Éducateurs Professionnels Canins (2019)

Toutes affirment que la relation avec un chien doit reposer sur la compréhension mutuelle, la coopération et l’usage de méthodes modernes et positives, validées scientifiquement.

Concrètement, cela signifie privilégier :

  • le renforcement positif : récompenser les bons comportements pour donner envie de les reproduire,

  • la désensibilisation : aider le chien à s’habituer en douceur à ce qui lui fait peur,

  • le contre-conditionnement : transformer une émotion négative en expérience positive, par exemple associer un bruit effrayant à une friandise.


Dans ce cadre, les règles de vie à la maison ne servent pas à « montrer qui commande », mais à trouver un équilibre entre les besoins de la famille et ceux du chien. Un comportement n’est plus interprété comme un défi d’autorité, mais compris comme une manière d’exprimer un besoin ou une émotion.


Les difficultés de comportement se travaillent alors à la racine, en cherchant pourquoi le chien agit ainsi, et non en imposant des interdits arbitraires.


👉 En choisissant cette voie, on construit une relation de confiance solide et durable, bénéfique autant pour l’humain que pour le chien. C’est une évolution comparable à celle que nos sociétés ont connue : tout comme on a abandonné l’idée que la violence était un moyen acceptable d’éduquer un enfant ou sa femme, on apprend aujourd’hui à éduquer un chien sans contrainte ni intimidation, dans un climat de respect et de coopération.


En résumé, Il est temps de tourner définitivement la page sur la théorie de la dominance, une approche aujourd’hui reconnue comme obsolète et inadaptée pour comprendre et accompagner nos chiens.

À la place, adoptons une vision plus moderne et éclairée, qui respecte la vraie nature de nos compagnons, valorise la coopération et renforce le lien que nous partageons avec eux.

Guidés par les connaissances actuelles en comportement animal, nous pouvons bâtir des relations fondées sur la compréhension mutuelle, la confiance et une communication positive.

Dans cette perspective, notre rôle n’est plus celui d’un « chef » ou d’un « dominant », mais celui d’un guide bienveillant, capable d’accompagner son chien dans la sérénité du quotidien.


Et si vous voulez aller plus loin, mon atelier comprendre "Qui est Canis ?" vous permettra de découvrir qui est vraiment votre chien, au-delà des idées reçues. Vous y trouverez des clés simples et concrètes pour construire une vraie complicité, solide et joyeuse, au quotidien.




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